L’écart se creuse
Les hôpitaux publics devant la montée des agences de placement privées en Ontario
n nouveau rapport de recherche du Centre canadien de politiques alternatives recommande que l’Ontario augmente considérablement le financement des hôpitaux tout en cessant progressivement d’avoir recours aux coûteuses agences de placement à but lucratif et en investissant dans les soins préventifs.
Le rapport intitulé Hollowed Out: Ontario public hospitals and the rise of private staffing agencies (L’écart se creuse : les hôpitaux publics devant la montée des agences de placement privées en Ontario) montre une corrélation entre la croissance spectaculaire du recours aux agences et le sous–financement des hôpitaux publics au cours des dix dernières années.
Entre 2013–2014 et 2022–2023, les hôpitaux de l’Ontario ont versé 9,2 milliards de dollars à des agences de placement à but lucratif qui coûtent jusqu’à trois fois plus cher que l’utilisation de personnel hospitalier à l’interne.
« Le recours aux agences de placement à but lucratif fait partie du cercle vicieux qui vide le secteur public de sa main–d’œuvre, augmentant ainsi la dépendance des hôpitaux à l’égard des agences privées », a déclaré Andrew Longhurst, chercheur associé du Centre canadien de politiques alternatives et auteur du rapport. « Le gouvernement doit prendre une série de mesures pour résoudre cette crise mais, pour ce faire, il est essentiel d’augmenter le financement des hôpitaux. Le problème du gaspillage de fonds publics dans les agences privées n’aurait jamais existé si les investissements destinés au personnel hospitalier de l’Ontario s’étaient adaptés aux besoins des patient(e)s. »
En tout, le personnel des agences comptait pour 6 % du coût total de la main–d’œuvre dans les hôpitaux entre 2013–2014 et 2022–2023, alors qu’il ne travaillait que 0,4 % de toutes les heures de première ligne.
En dollars réels, les dépenses publiques par habitant pour le personnel hospitalier travaillant dans la région du sud–est – qui comprend Kingston – ont augmenté de près de 6 %, alors que les dépenses pour le personnel des agences ont augmenté de 181 % au
cours de la période de dix ans.
Le rapport mentionne que le financement des hôpitaux par habitant en Ontario est le plus faible de tout le Canada. Entre 2013 et 2022, le gouvernement ontarien a réduit ses dépenses en dollars indexés sept années sur dix, ce qui a entraîné une croissance insuffisante des effectifs par rapport à la demande.
Les charges de travail de plus en plus lourdes, combinées aux baisses de salaires en dollars réels, ont entraîné une augmentation des postes vacants de l’ordre de 330 % depuis 2015. Au cours de cette période, les revenus du personnel hospitalier ont diminué de 13 %.
« Pour sauver nos services hospitaliers, il faut investir dans le personnel qui les fournit », d’affirmer Michael Hurley, président du Conseil des syndicats d’hôpitaux de l’Ontario du SCFP (CSHO–SCFP). « Le gouvernement doit s’engager à respecter des normes de dotation en personnel, dont des ratios infirmier(ère)/patient(e)s, afin d’assurer des charges de travail gérables, ce qui permettrait au personnel de prodiguer des soins au mieux de ses capacités, d’améliorer le moral et la rétention du personnel et de stabiliser le système. »
Mais selon M. Longhurst, le système est plutôt en train de se fracturer en raison d’une combinaison de demande accrue, d’explosion des coûts des agences et de sous–financement provincial. Par conséquent, près de la moitié des hôpitaux ont été confrontés à un déficit budgétaire en 2023–2024 et la majorité d’entre eux devraient avoir des arriérés cette année.
M. Longhurst a recommandé que l’Ontario s’inspire de la Colombie–Britannique et crée une agence de placement dans le secteur public qui soulagerait les hôpitaux les plus éprouvés, tout en cessant progressivement d’avoir recours aux agences privées sur une période de trois ans.
Parmi les autres mesures prescrites pour régler la crise, il y a l’élaboration d’une stratégie de dotation en personnel dans les soins de santé et des investissements dans les services hospitaliers (augmentation annuelle de 2 milliards de dollars) et les soins primaires et communautaires.
Les tableaux ci–dessous sont disponibles en anglais seulement.

